- Auteure : Anne Cortey
- Illustratrice : Carole Chaix
- Éditeur : A pas de loups
Quatrième de couverture : Avec des lettres, au fil des jours, Camille échange avec Papipa, son grand père. Elle cherche à découvrir un secret caché…
Un secret aux couleurs de la Méditerranée et un retour vers l’Histoire.
Pourquoi est-ce que je l’ai aimé ? Tout commence avec des traits de crayon, des touches d’encre et des couleurs. Ce sont les crayons qui racontent la vie d’un vieil homme aux teintes bleu-gris et aux souvenirs lourds. Un homme triste et solitaire hanté par les spectres de son passé. Ce sont aussi les crayons qui dessinent la vie multicolore d’une jeune fille, Camille, qui habite avec sa maman dans une ville ensoleillée. Cette fille aux cheveux flottants, curieuse et pleine de vitalité, est la petite fille du vieux monsieur. Celle-ci veut à tout prix connaître la vérité sur le silence de son grand-père, Papipa, et le faire entrer dans sa vie.
C’est ici qu’apparaissent les lettres : sous les touches de la vieille machine à écrire, les sentiments se transforment en mots, les questions prennent la forme de motifs colorés, les réflexions s’approfondissent. Camille partage son expérience quotidienne avec enthousiasme, elle raconte les odeurs et les saveurs de son quartier habité en grande partie par des Algériens, elle décrit des petits événements, familiaux et entre voisins, elle dévoile son envie d’apprendre l’arabe d’Algérie… Les lettres de la jeune fille s’envolent vers Papipa dans une multitude d’oiseaux joyeux, les témoins de son amour pour ce peuple qui est aussi le sien et qu’elle est justement en train de découvrir.
Avec ses lettres, Camille lance un appel pour briser le silence d’un être cher, pour comprendre le passé afin de mieux accepter le présent, pour découvrir les liens entre les générations ainsi que ceux qui la lient avec l’Algérie. Un appel aussi d’amour pour combler le vide laissé par le départ de son père et par l’écart volontaire de son grand-père. Déterminée, elle mène sa propre recherche et, petit à petit, découvre la vérité. Le silence enfin brisé, Camille attend avec impatience l’arrivée proche de Papipa…
Anne Cortey signe ici un texte d’une grande sensibilité avec beaucoup de justesse. Grâce à la légèreté et à la finesse de sa plume, les lettres de Camille deviennent la respiration naturelle de la narration en transportant ainsi le lecteur, tour à tour dans les quartiers de Marseille, dans la Méditerranée ou dans cette Algérie pas très lointaine ravagée par la guerre. Tranquillement, sans émotions excessives, avec beaucoup de délicatesse et d’authenticité, l’auteure évoque ce douloureux héritage de la guerre que portent beaucoup d’anciens soldats refermés dans leur culpabilité ou dénégation.
Mais la vraie force de cet album réside dans une symbiose singulière entre le récit et les illustrations. Et quelles illustrations ! L’illustratrice fait valser ses crayons sur la musique des lettres accompagnée de son imagination, et le résultat est époustouflant. Extrêmement élaborés, travaillés avec réflexion et minutie, empreints tantôt de réalisme, tantôt de symbolisme, les dessins remplissent les pages en lignes douces, en formes géométriques, en mosaïques de couleurs, en milliers de détails sympathiques et pertinents. Ils enrichissent le texte, le complètent et le prolongent au-delà de l’écrit, en suivant leur libre cours non-restreint par le temps ou par l’espace. Et tout cela avec une légèreté, une précision et une grâce surprenantes – absolument magnifique !
Un bijou d’album accompli avec brio à quatre mains qui envoûte et qui fait réfléchir, qui fait grandir et qui illumine de l’intérieur, qui laisse une empreinte nostalgique et lumineuse pour longtemps. Un livre nécessaire dans chaque bibliothèque qui confirme la réputation de l’éditeur.
A savourer !
Recommandé pour :
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Note : chronique réalisée dans le cadre d’un service de presse.