J’ai eu le plaisir de rencontrer Agnès Laroche à plusieurs occasions, et chaque fois je l’ai vue entourée d’enfants et de leurs parents, invariablement bienveillante et souriante. Je vous propose aujourd’hui mon interview avec cette auteure prolifique et bien connue dans la littérature jeunesse, et je vous invite à (re)découvrir son univers au plus vite !
Vous êtes auteure de nombreux romans, albums et récits publiés en presse enfantine. Qu’est-ce qui vous a incité à vous lancer dans l’écriture pour les enfants ?
J’ai commencé à écrire par plaisir. Je me suis amusée à tenter d’écrire un roman pour la jeunesse et j’ai eu la chance qu’il soit édité. J’ai adoré cette première expérience d’écriture et depuis je n’ai plus jamais arrêté. C’était il y a neuf ans. J’ai enchaîné après avec d’autres romans et d’autres publications, une trentaine à ce jour.
Vous avez une riche palette de romans dans différents genres : science-fiction, fantastique, roman policier, psychologique, politique… Est-ce que vous avez un genre de prédilection ?
Non, j’aime tous les genres dans la littérature. J’écris du policier (« Sauve-toi Nora ! » Rageot, 2012)*, du fantastique (« Tim sans-dragon » Oskar éditeur, 2008), du romantique (« La vraie recette d’amour » Rageot, 2016), de l’historique (« Tu vas payer » Rageot 2013), du politique (« On a rien vu venir » Alice jeunesse, 2012) — tout m’amuse, tout me plaît. Je ne m’interdis aucun genre. J’ai peut-être une petite préférence pour le policier mais encore, j’aime tout ! C’est pareil pour la lecture : je lis la littérature pour les adultes ainsi que la littérature jeunesse. J’aime tout donc je lis tout.
Est-ce que vous préférez écrire des albums ou des romans ?
Je préfère de très loin écrire des romans, c’est ce qui me vient de façon très naturel. C’est bien plus difficile pour moi d’écrire un album de quelques pages qu’un roman de 200 pages. J’écris donc très peu d’albums. J’ai plus de facilité à écrire sur la longueur.
Nous embarquons facilement dans vos romans et y restons accrochés jusqu’à la dernière page. Avec le regret, toutefois, qu’ils se terminent trop vite. Avez-vous déjà songé à écrire un roman plus gros?
Dans l’absolu, j’aimerais bien, mais j’ai l’impression que mon cerveau est malgré moi programmé pour ne pas dépasser les 200 pages. (rire).
J’ai bien aimé votre roman « Charly et moi » (Auzou, 2015) qui raconte l’histoire de deux ados « pas comme les autres ». La justesse de votre propos m’a profondément marquée. Avez-vous basé votre écriture sur une expérience réelle? D’où tenez-vous cette capacité de décrire le monde des jeunes adolescents avec autant d’authenticité ?
Non, pas particulièrement. J’ai trois ados à la maison, cela aide un peu. Mais je pense que c’est surtout grâce au fait que je suis restée connectée à ce que l’on ressent quand on a entre 10 et 15 ans. Je suis très sensible à cette période de la vie.
Vos romans décrochent beaucoup de prix décernés par les collégiens. Qu’est-ce qui fait, à votre avis, qu’ils aient autant de succès auprès des jeunes lecteurs ?
En fait, il est difficile de dire pourquoi les lecteurs aiment vos livres. Sur un plan strictement technique, je pense qu’ils apprécient d’entrer rapidement dans l’histoire. D’une manière générale, je me sens très proche de mes personnages, et j’essaie de faire en sorte que mes lecteurs partagent avec moi cette intimité.
Racontez-nous votre dernière visite en Nouvelle Calédonie en lien avec le Prix Livre, mon ami (Nouméa, 2015).
J’ai écrit un roman policier qui s’appelle « Le fantôme de Sarah Fisher » (Rageot, 2011), c’est celui-ci qui a reçu le Prix Livre, mon ami en Nouvelle Calédonie. Ce prix consiste à partir là-bas et rencontrer les élèves pendant 15 jours. J’ai y rencontré des enfants de 6ème et de CM2 des écoles de la Nouvelle Calédonie et des îles adjacentes. Ces rencontres ont été fabuleuses !
Qu’est-ce que vous apportent les rencontres avec vos lecteurs ?
Quand j’écris, je ne pense pas du tout au lecteur, je ne pense qu’à moi et au plaisir que j’ai à raconter une histoire. Alors, quand je rencontre mes lecteurs, je ressens des responsabilités vis-à-vis à eux : attention, tu n’écris pas que pour toi, tu écris aussi pour les autres. Ça fait du bien de s’en rendre compte. C’est gratifiant de rencontrer les personnes qui ont lu et apprécié vos livres. Cela permet aussi de rompre avec la solitude car quand on écrit, on est dans la solitude la plus totale. On passe donc de l’autre côté du miroir lorsqu’on se retrouve face aux enfants, et ça fait beaucoup de bien.
Votre album « Dans les yeux de loup » illustré par Aurélia Fronty figure dans la sélection des White Ravens 2015. Est-ce qu’il y a un message particulier que vous avez cherché à faire passer ?
L’idée de départ c’est que le bien-être ne provient pas automatiquement et nécessairement de la famille initiale, ça peut venir aussi d’autres personnes qui surgissent dans notre vie, d’une famille qu’on se créée. J’aimerais ajouter que les illustrations d’Aurélia Fronty dans cet album sont somptueuses. J’ai eu beaucoup de chance que l’éditrice de Kilowatt fasse appel à elle.
J’ai beaucoup aimé la série d’albums « Nicodème » chez les éditions Alice Jeunesse. Quelle est l’histoire de la création de ce petit personnage très sympathique ?
Nicodème s’inspire d’un petit garçon que je connais bien, timide, discret, particulièrement attachant. Je lui fais vivre de petites histoires du quotidien, et les dessins de Stéphanie Augusseau, l’illustratrice, sont aussi une source d’inspiration.
Pourriez-vous nous présenter brièvement vos dernières parutions ?
La série des « Mortimer Mort-de-Peur », de petits policiers à lire à partir de 8 ans (Rageot), et un album, « La clochette du Mandarin » (Sarbacane, novembre 2016), illustré par le talentueux Marcelino Truong.
Comment voyez-vous l’avenir du livre jeunesse ?
Je vois très bien l’avenir du livre jeunesse ! Que ce soit sur le support papier ou sur le support numérique. Je préfère évidement qu’un enfant lise sur un livre papier (car c’est ma génération), mais si maintenant il lit sur une tablette, ça m’est égal. Tout ce qui compte, c’est ce qu’il lise. Mais je pense que tant que le soleil brillera, nous entendrons tourner les pages des livres, réelles ou virtuelles, parce que nous avons tous besoin que l’on nous raconte des histoires. Toujours. A tout âge.
Quels ingrédients, à votre avis, doit contenir un livre idéal ?
Pour moi, en tant que lectrice, un très bon livre doit être très bon tout de suite, ce qui n’est pas forcément facile. Quand je lis, j’ai besoin d’être très proche des personnages et j’ai besoin que les personnages soient très profondément creusés. Il est nécessaire pour moi de ne faire plus qu’un avec les protagonistes. Si je le sens dès les premières pages, en général, c’est gagné. Puis, évidemment, il faut que surgisse une palette variée d’émotions. Voilà ce qui est indispensable : un personnage fort qui m’embarque avec lui, qui convoque des émotions variées et qui me surprend.
Avez-vous un lieu préféré d’écriture ?
Chez moi. Je ne suis vraiment bien à 100% que chez moi (rire).
Pouvez-vous vous décrire en un mot ?
Curieuse. Je pense que c’est ma principale caractéristique, je suis quelqu’un de très curieux.
Quel est votre livre jeunesse préféré ?
Le livre que j’adore au-delà de tout, (je ne vais pas être originale du tout), c’est « Max et les Maximonstres » de Maurice Sendak. Je l’adore vraiment ! J’aime aussi beaucoup les romans de Robin Hobb. Ce sont de longues sagas fantasy, telle que « L’assassin royal », mon grand favori.
Est-ce qu’il y a titre que vous aimeriez voler à un autre auteur ?
Il y en a plein ! (rire) Je vois très souvent de super titres qui me font rêver. C’est vrai que les titres sont fréquemment source de créativité pour moi, ils nourrissent mon imagination et me donnent des idées.
En tant que lectrice, lire, ça vous transporte où ?
Partout ! Lire pour moi, c’est indispensable, c’est vital, ça m’est impossible de ne pas lire dans une journée. Je pourrais arrêter d’écrire mais je ne pourrais pas arrêter de lire. Je pourrais arrêter plein de choses mais je ne pourrais pas arrêter de lire. Ça me transporte dans la vie des autres, tout simplement, des vies de fiction dont j’ai besoin.
Est-ce que vous avez un message pour les jeunes adolescents d’aujourd’hui ?
J’aimerais leur dire que la vie est belle, c’est tout.
Merci beaucoup pour cette interview très intéressant et bonne continuation dans tous vos projets !
4 décembre 2015, SLPJ de Montreuil, France (mise à jour : octobre 2016)
*Tous les exemples de livres entre parenthèses sont ajoutés par la chroniqueuse.
Le site internet d’Agnès Laroche : http://agneslaroche.blogspot.fr/