∗Accompagné d’un jeu littéraire de Cadavre Exquis (variante)∗
MYMI DOINET :
« Émotions, couleurs, senteurs »
L’autrice de nombreuses « Premières lectures », parmi lesquelles les séries Les animaux de Lou et La tour Eiffel aux éditions Nathan, Mymi Doinet est lauréate de plusieurs Prix littéraires dont le Prix de Bologne 1998. Bien connue et bien aimée des enfants, elle organise fréquemment des rencontres et des ateliers scolaires autour de jeux de linguistique et d’écriture de comptines. Ses textes rythmés, humoristiques et chatoyants sont très appréciés par ses jeunes lectrices et lecteurs. Je vous invite à découvrir son
Portrait littéraire et pas que…
Le(s) mot(s) qui vous définit (définissent) le mieux…
Émotions, couleurs, senteurs
Ecrire pour vous c’est…
Vitale. J’écris tous les jours, c’est mon oxygène, mon sport de haut niveau. Comme les danseuses font leurs pointes ou les pianistes leurs préludes, j’ai besoin de faire quotidiennement mes gammes de mots, vocables que je dis à voix haute pour trouver la juste musicalité des phrases, des mots symphonies !
Vos influences littéraires/artistiques…
Bizarrement, je dirais qu’en premier lieu, ce sont les dictionnaires de mots et de rimes qui m’influencent. J’ai eu un Larousse alors que j’étais toute gamine. Depuis collectionner, marier les mots ne m’a jamais quittée.
Vous puisez votre inspiration…
Dans tout ce qui m’entoure, les objets, les délices, les fleurs, tout ce qui est sensuel en fait pour les yeux, les narines, le toucher, l’ouïe. Et puis comme beaucoup d’autrices, je suis aussi une grande lectrice, car lire est contagieux, ça donne envie d’écrire ses propres promenades et mondes.
Vos personnages naissent…
Il suffit d’observer tout autour de soi, mais j’avoue que beaucoup de mes personnages sont nés dans des gares, tel Pavel de Un piano pour Pavel (éditions Nathan) mon petit virtuose de piano, tout jeune garçon que j’en rencontré à la gare de Lyon lors de départ en vacances. Ou Gustavel le héros de Pas touche à Charly (éditions Nathan), SDF rencontré à la gare d’Austerlitz, un soir de novembre.
Le meilleur moment pour écrire…
Pour moi, tous les moments sont souvent propices à la lecture, des instant joyeux ou tristes. De plus, étant insomniaque, j’écris jour et nuit, mais mon moment plus que privilégié est l’aube, quand le soleil se lève sur mes gammes de mots et que mon thé Earl grey infuse avec ses bouquets de senteurs.
Votre plus beau souvenir en tant qu’autrice…
Mes ateliers d’écriture autour de l’art de la comptine avec des élèves en grande difficulté scolaire qui découvrent qu’en mariant les phrases et les mots, ils deviennent à leur tour créateurs et créatrices de poésies.
Votre lecture-refuge…
Le livre du moment que je suis en train de lire, quand je le retrouve après une journée d’écriture bien au chaud sous ma couette avec ma pile d’oreillers pour transat dans le silence ou accompagné d’un air de jazz, Bill Evans est idéal pour ça.
Le livre à offrir à tout le monde…
L’homme à l’oreille coupée de Jean-Claude Mourlevat (éditions Thierry Magnier)
Votre rêve le plus extravagant…
Que sur chaque continent, chaque enfant puisse avoir sa bibliothèque rempli de livres refuges, cadeaux, délices, comme autant de bons mille-feuilles à savourer.
Un petit mot pour vos lecteurs/lectrices…
Avec 26 lettres, je m’étonne et m’émerveille chaque jour un peu plus de ce que nous offre la littérature, où l’imaginaire rejoint la réalité, où la réalité se mêle à la fiction, où le sucre glace devient banquise exquise, où la rosée du matin coulent en petites larmes sur les jardins, où…à vous de continuer la suite, mes chers lectrices et lecteurs.
Merci beaucoup, Mymi, pour vos réponses en tous points passionnantes et bonne continuation dans tous vos projets littéraires !
Et en bonus, un jeu du cadavre exquis pour tous les participants de la série de portraits littéraires/artistiques. Voici la contribution de Mymi Doinet (en rose).
Le cadavre exquis
« Le soleil brillait sur le paysage vallonné, caressait les vignes de ses rayons et fixait de son œil jaune la scène du crime.
— Se peut-il que ce cadavre soit exquis ? murmura le soleil.
— Il se peut, lui répondit un petit oiseau perché sur le corps frêle, celui-là l’est assurément.
Et le bec replongea au cœur de l’abdomen frétillant d’insectes et de fruits mûrs. Des grappes de raisins et des amas de figues noires recouvraient le délicieux petit cadavre.
L’oiseau picora la cage thoracique. En becquetant un pépin de figue, il perça le cœur du cadavre. Un filet de vapeur s’en échappa en chuintant, faisant fuir le volatile à tire d’ailes. C’est ainsi que l’âme s’échappa du corps. Elle s’étira, tournoya, profitant de l’air si doux de cette fin de matinée. Elle aurait volontiers batifolé entre les vignes, voletant de-ci, de-là. Mais elle se re-condensa avec soin. L’heure n’était pas à l’éparpillement. Car d’autres allaient bientôt mourir à leur tour.
De toute façon, l’âme n’était pas du matin. L’âme n’aimait pas, vraiment pas, qu’on la dérange. Cette âme-là n’était pas une bonne âme. Elle détestait la bonne humeur. Elle pouvait à tout moment filer sous la vapeur. Elle attendit que passe la cavalerie des étourneaux, que le soleil reprenne sa place, bien haut, sur l’écume des nuages, pour rejoindre la départementale 249.
En planant au-dessus de la route, l’âme en rencontra une autre, une qui venait de quitter un corps à peine tiédi ayant en plein cœur une tache rouge coquelicot, ou rouge brasier ou rouge baiser.
Telles de parfaites ondes magnétiques, les deux âmes réunies se réchauffèrent, elles allaient avoir l’éternité pour faire connaissance…»
**Une petite précision concernant le jeu : il s’agit d’une version modifiée du cadavre exquis. L’incipit d’Anne Loyer laissant présager le genre policier, les participants doivent prendre conscience des contributions précédentes.
Pour voir la bibliographie et le site Internet de Mymi Doinet, cliquez sur l’image au début de l’article !
Pour lire ma chronique de la série « Les animaux de Lou » écrite par Mymi Doinet, cliquez sur le titre de la série.
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